Une proposition de loi pour le foot ou une proposition de loi pour le sport professionnel ? Patrick Bayeux
Le football professionnel français traverse une crise profonde, marquée par des dysfonctionnements de gouvernance, une incertitude croissante sur l’évolution des droits télévisés et un modèle économique remis en cause. Une crise de nature à redéfinir les prérogatives de la LFP par rapport à celles de la ligue ? on sera fixé prochainement.
Cette situation , dénoncée dans le rapport de Laurent Lafond et Michel Savin, impose une réflexion de fond sur l’avenir du football professionnel. Cependant, ces difficultés ne se limitent pas à cette discipline alors que Laurent Lafon, et Michel Savin s’apprêtent à déposer une proposition de loi qui vise à apporter un cadre et des outils renouvelés au football professionnel afin que celui-ci puisse collectivement se redonner un avenir. C’est l’ensemble du sport professionnel français qui doit être repensé.
L’incertitude des droits TV et de la solidarité financière
La digitalisation croissante des services et l’émergence de nouvelles plateformes de diffusion remettent en question la viabilité des modèles économiques fondés sur la croissance continue des droits télévisés. Par ailleurs, la solidarité entre sport professionnel et sport amateur est menacée, notamment avec l’avenir incertain de la taxe Buffet d’où la nécessité d’intégrer l’ensemble des revenus générés par le sport professionnel, y compris ceux issus des paris sportifs, dans un cadre de financement équilibré.
L’illégalité du soutien financier accordé par les collectivités territoriales aux sports de salle
Le soutien accordé à certains sports en salle, sous couvert de missions d’intérêt général, se traduit souvent par des subventions dépassant les dépenses réelles des clubs professionnels, soulevant ainsi une question de légalité et de conformité de ces aides publiques. Nous avons à plusieurs reprises dénoncé cette situation (et déjà en 2016 Avr. 19, 2016 lors de la Grande Conférence sur le Sport Professionnel Français ) qui pourrait s’avérer explosive en cas de recours qui pourrait contester sur le fondement du code du sport le montant de ces subventions au motif qu’il dépasse largement ce que peuvent justifier les clubs au titre des missions d’’intérêt général. C’est toute l’organisation des ligues professionnelles de basketball et de handball qui pourrait être remise en cause.
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Des subventions excessives transformant les clubs en pouvoirs adjudicateurs ?
Lorsque les subventions publiques dépassent 50 % du budget d’un club, celui-ci pourrait être assimilé à un pouvoir adjudicateur, soumis aux règles de la commande publique. Le rapport sénatorial Mutualiser, renouveler et légitimer pour affûter l’esprit d’équipe des fédérations sportives avait déjà soulevé cette problématique pour les fédérations. Cette question doit être examinée pour les clubs bénéficiant d’un financement public prépondérant.
La difficulté de mettre à disposition une enceinte sportive sans mise en concurrence
Les clubs professionnels doivent être mis en concurrence pour exploiter une enceinte sportive conformément à l’article L2122-1-1 du Code de la propriété des personnes publiques. Ce cadre juridique, bien que garantissant la transparence et l’égalité d’accès, complique la gestion des infrastructures sportives. Une exception spécifique pour l’exploitation des enceintes sportives par les clubs professionnels pourrait permettre une gestion plus cohérente et pérenne.
C’est pour cette raison que dans le rapport nouvelle gouvernance du sport la proposition 43 visait à permettre de mettre à disposition une enceinte à une club sportif professionnel sans le mettre en concurrence.
La question de la redevance acquittée par les clubs sportifs
les clubs professionnels ont l’obligation sur le fondement du code de la propriété des personnes publiques de payer une redevance pour l’utilisation des enceintes sportives. La DNID ( DIRECTION NATIONALE D’INTERVENTIONS DOMANIALES) du ministère de l’économie des finances et de la relance a publié une instruction sur les modalités de fixation des redevances d’occupation des stades par des clubs résidents professionnels de football et de rugby. Force est de constater que l’application de cette instruction est trés disparates selon les collectivité. Faut il la traduire dans le code du sport , qu’en est il des sports de salles ?
A lire
La difficulté de passer d’un modèle public privé à un modèle privé public.
Les collectivités territoriales seront de plus en plus réticente à construire des enceintes pour les clubs professionnels dans un contexte financier de plus en plus contraint. Pour permettre d’évoluer d’un modèle public privé vers un modèle privé public encore faut il disposer des outils. Les collectivités sont aujourd’hui entravées dans leur capacité à soutenir les infrastructures sportives portées par des clubs professionnels, en raison des restrictions du Code du sport qui interdit le financement d’enceintes sportives d’initiatives privées. Il s’avère qu’une participation publique est nécessaire et est de nature à rassurer les établissements bancaires. Aujourd’hui la seule possibilité est d’actionner le régime d’aides en faveur des infrastructures sportives et des infrastructures récréatives multifonctionnelles, n°SA.111817 et à la faveur d’une déclaration d’intérêt général de la loi n°2009-888 du 22 juillet 2009 … pas simple.
A lire
Des états généraux du sport s’imposent #EGS2025
Face à ces enjeux, il est nécessaire de proposer une loi réformant en profondeur le cadre juridique et économique du sport professionnel. Cette réforme s’inscrira dans une dynamique plus large, appelant à l’organisation des États généraux du sport professionnel afin d’associer l’ensemble des parties prenantes à la définition d’un nouveau modèle.