Faut-il encore subventionner les clubs de football professionnel ? Et pour quelles missions d’intérêt général ? par Patrick Bayeux
Alors que certains clubs professionnels sont devenus des actifs financiers détenus par des fonds d’investissement étrangers, la question de leur financement public local mérite d’être posée avec lucidité. Alors que la proposition de loi sur l’organisation, la gestion et le financement du sport professionnel sera en débat le 10 juin il serait bien de se saisir du sujet !
Le sport professionnel en général et le foot en particulier a changé de nature depuis les fameux décrets Pasqua 1995.
Autrefois propriété d’entrepreneurs locaux, le sport professionnel est devenu et en particulier dans le foot , un objet économique mondialisé, parfois éloigné des valeurs d’intérêt général qui justifient l’intervention publique. C’est particulièrement vrai dans le football, où plusieurs clubs professionnels français sont aujourd’hui détenus par des fonds d’investissement, à des milliers de kilomètres des stades qu’ils exploitent.
Pourtant, nombre de ces clubs professionnels (y compris en ligue 1) continuent de percevoir des subventions des collectivités locales, souvent des villes-centres, voire des intercommunalités au nom de missions d’intérêt général principalement liées à la formation*
Mais que reste-t-il de ces missions quand les choix stratégiques du club échappent aux logiques territoriales ? Peut-on encore parler mission d’intérêt lorsque l’entreprise sportive vise avant tout le retour sur investissement de ses actionnaires à travers la vente de joueurs formés au centre de formation ?
Une nécessité : repenser le soutien à l’échelle intercommunale
Il ne s’agit pas forcément de supprimer toutes subventions, mais de les redéfinir en profondeur et ceci d’autant plus que pour le volley, le hand et le basket elles sont dans un grand nombre de cas illégale.
Alors que la proposition de loi sur le sport professionnel arrive au Sénat le 10 juin, il est nécessaire de poser la question de l’obligation de faire porter la compétence sport professionnel aux intercommunalités. Chacun s’accorde aujourd’hui pour dire que le sport professionnel rayonne largement au delà de la ville centre.
Le soutien pour des missions d’intérêt général fondée sur un club qui irrigue le territoire intercommunal
Dès lors une des pistes serait de redéfinir les missions d’intérêt général à l’échelle intercommunale. Il s’agirait de lier toute aide publique à des engagements fermes permettant de faire rayonner la discipline sur le territoire dans les communes et les clubs : partage d’installations, soutien à la formation, animation de stages pour les jeunes, présence des joueurs/ joueuses dans les quartiers, les communes, les villages, coopération renforcée avec les clubs amateurs du territoire, …. Au final, une véritable mission d’intérêt général, actualisée et contractualisée. Un club professionnel qui irrigue le territoire. En passant, ceci permettrait aussi de régler pour partie le problème des sports de salles !
Aller plus loin ? débattre de la ligue fermée ? du salary cap ?
Si le débat autour de la loi sur le sport professionnel est la question de l’avenir du modèle économique du sport professionnel au delà de la seule gouvernance du sport professionnel lui même, il est nécessaire de poser sur la table le sujet de la ligue fermée. Le sujet n’est pas nouveau, j’en parlais déjà en 2013 !
A lire
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Une ligue fermée , 75 % les français y sont favorables pour la super ligue Européenne !
Une ligue fermée permettrait non seulement de rassurer les investisseurs mais également les collectivités territoriales qui ont investi des millions d’euros dans les enceintes sportives…. Un salary cap ? Le plafonnement de la masse salariale imposé à chaque club, destiné à limiter les écarts financiers entre équipes, peut il être de nature à mieux garantir l’équité compétitive entre les clubs, et au final à rassurer les investisseurs ?
Alors on en parle ? Quel club professionnel voulons-nous pour demain ? Un actif spéculatif détenu à l’autre bout du monde ou un acteur ancré, au service de son territoire ? Une proposition de loi pour le foot ou pour le sport pro ?
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* Art R 113-2 du code du sport
Les missions d’intérêt général mentionnées à l’article L. 113-2 concernent :
1° La formation, le perfectionnement et l’insertion scolaire ou professionnelle des jeunes sportifs accueillis dans les centres de formation agréés dans les conditions prévues à l’article L. 211-4 ;
2° La participation de l’association ou de la société à des actions d’éducation, d’intégration ou de cohésion sociale ;
3° La mise en oeuvre d’actions visant à l’amélioration de la sécurité du public et à la prévention de la violence dans les enceintes sportives.