Décisions politiques, jamais le principe de la rationalité limitée n’a été autant d’actualité ! par Patrick Bayeux
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La décision, ou plutôt le processus de décision est ma passion d’où le nom du site. Dès que j’ai commencé à côtoyer ou observer les politiques je me suis posé la question : mais comment sont prises les décisions. J’y ai consacré une thèse en sciences de gestion (soutenue en janvier 2000). Depuis tous les jours ou presque, je peux observer ce que j’avais mis en exergue à partir des travaux de Herbert Simon sur la rationalité limitée.
Pour Herbert Simon, les individus, en tant que décideurs, possèdent des limitations cognitives et informationnelles qui les empêchent de prendre des décisions parfaitement rationnelles (Capacités cognitives limitées, information incomplète, temps limité, satisfaction plutôt qu’optimisation, environnement complexe, … )
Dans ma thèse appliquée à la prise de décision des élus locaux j’ai mis en évidence que toutes les décisions sont prises en référence à une rationalité dominante. J’ai identifié 3 rationalités structurantes :
- la rationalité stratégique
- la rationalité gestionnaire
- la rationalité personnelle
La rationalité stratégique : Ce qui prédomine dans la prise de décision est le souci de conduire un bon projet politique au nom de la conception que les acteurs se font de la conduite de la vie de la cité et de l’intérêt général.
La rationalité gestionnaire : elle est technique, administrative et financière. C’est la rationalité basée sur la compétence et l’expertise qui est proche du modèle mono-rationnel.
La rationalité individuelle : ce qui prime avant tout est l’intérêt personnel que pourra retirer l’acteur de la décision prise.
Ces trois rationalités structurantes font émerger des formes combinées de rationalités décisionnelles
La rationalité électorale – opportuniste : elle est le résultat de la rationalité stratégique et de la rationalité individuelle.
La rationalité technocratique bureaucratique est la combinaison de la rationalité individuelle et de la rationalité gestionnaire. Elle permet à un élu de s’abriter derrière des arguments administratifs, financiers et techniques pour répondre négativement.
La rationalité managériale ou gouvernementale. C’est le croisement de la rationalité stratégique et de la rationalité gestionnaire, entre le projet politique et les moyens.
La rationalité politique : dans bien des cas, les trois formes de rationalité sont présentes dans le processus de décision, c’est pour cette raison que nous la qualifions de rationalité politique.
Depuis plus de 20 ans à chaque fois que je suis témoin d’une décision, je me pose la question du positionnement de la décision dans le cube de la rationalité décisionnelle …
Alors je vous laisse méditer sur ce qui se passe en ce moment : quelle rationalité domine ?
« Les idées et les programmes avant les postes et les personnalités » E Macron
Cette analyse s’applique également au président de la république qui dans sa lettre aux Français, souhaite que les idées et les programmes passent avant les postes et les personnalités et demande aux élus dans la tradition de la Vème République, de placer leur pays au-dessus de leur parti, la Nation au-dessus de leur ambition.
Par contre si j’applique mon cube de la rationalité politique à la décision d’Emmanuel Macron de dissoudre l’assemblée nationale à quelques semaines des JOP #Paris2024, j’avoue que j’hésite sur le ressort qui a conduit à cette décision ….
