Sport de haut niveau : pour une réforme structurelle État–territoires et un rattachement des MRP aux DRAJES Patrick Bayeux Patrick Roult
La gouvernance territoriale du sport de haut niveau en France, modelée par des réformes successives et parfois contradictoires, souffre aujourd’hui d’une fragmentation structurelle qui a significativement érodé la capacité de pilotage stratégique de l’État. La création de l’Agence Nationale du Sport (ANS) en 2019, bien que porteuse d’une ambition de gouvernance partagée, n’a pas résolu, et a dans certains cas complexifié, l’articulation des acteurs sur le terrain. Au moment où l’État renforce son pouvoir de pilotage à travers les préfets, la structuration territoriale de la haute performance mériterait d’être réinterrogée.
A lire
La gestion du haut niveau sur les territoires, un système temporaire qui ne tient plus
La dynamique de recentralisation en cours avec la récente désignation des préfets comme délégués territoriaux de l’ANS, l’annonce par la ministre du caractère facultatif des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs du sport remet en cause toute l’organisation de la gouvernance du sport sur les territoires y compris le haut niveau. Dans ce contexte, la place des Maisons Régionales de la Performance (MRP), aujourd’hui rattachées aux CREPS, n’apparaît que comme un héritage conjoncturel de la préparation des JOP #Paris2024.
Ce montage, qualifié de « moins mauvaise des solutions », a reposé uniquement sur la motivation et l’énergie des cadres en charge de la performance et des cadres techniques. Mais fini l’élan olympique il montre aujourd’hui ses limites et les failles structurelles sont de plus en plus visible : double hiérarchie, manque de lisibilité, absence d’autorité unique. Résultat, ce qu’on avait pressenti se dessine : « ce système ne fonctionne pas d’un point de vue organisationnel » s’il a pu fonctionner c’est parce que chacun y mis toute son énergie pour réussir les jeux, comme souvent les cadres du ministère des sports ont porté à bout de bras un dispositif pensé à la va-vite.
Sortir du bricolage : rattacher les MRP aux DRAJES
Notre proposition est claire : rattacher les MRP aux Délégations Régionales Académiques à la Jeunesse, à l’Engagement et aux Sports (DRAJES).
Trois avantages majeurs émergeraient de cette réorganisation :
- Un contrôle intégral par l’État : les DRAJES disposeraient enfin d’une vision complète des politiques fédérales, à la fois développement et performance, au lieu d’un partage bancal des responsabilités.
- Une cohérence des ressources humaines : les cadres techniques, déjà sous la responsabilité des DRAJES, seraient pleinement intégrés à une chaîne hiérarchique unique et lisible.
- Une meilleure lisibilité sur les territoires
Cette réforme constituerait une étape décisive pour clarifier le rôle de l’État au niveau régional et sécuriser le haut niveau et singulièrement la haute performance.
Avantage | Description |
1. Un contrôle étatique intégral | Le rattachement des MRP aux DRAJES permettrait à l’État, au niveau régional, d’avoir une vision consolidée sur la totalité des politiques fédérales. Actuellement, la vision des DRAJES est partielle : elles contrôlent le volet « développement des pratiques » du projet sportif fédéral, mais n’ont « aucune vision sur le projet de performance fédérale« , qui est contrôlé par les MRP sous l’égide des CREPS. Cette réforme permettrait donc à l’État d’exercer une « véritable mission de contrôle » sur l’ensemble du spectre. |
2. Une synergie des ressources humaines | Les DRAJES sont déjà en charge des cadres techniques, dont une partie des missions est consacrée à la performance. Intégrer les MRP au sein des DRAJES créerait une cohérence organisationnelle et un alignement logique des ressources humaines dédiées au haut niveau sous une seule et même autorité régionale. |
3. Une meilleure lisibilité | Au-delà de l’organisation et de l’efficacité du dispositif, le rattachement des MRP aux DRAJES et non au CREPS réglerait définitivement le problème des egos là où il y a plusieurs Creps, … et là où il n’y en a pas d’ailleurs … |
L’échec du GIP ANS et la nécessité d’une transformation en EPA.
L’évaluation de la forme actuelle de l’agence est sans équivoque : « l’agence sous la forme d’un GIP n’a jamais fonctionné ». Ce statut de Groupement d’Intérêt Public s’est révélé inefficace pour piloter la politique sportive nationale. En tout cas sur les territoires on sait pourquoi. (cf art erreurs fatales)
A lire
Vers une ANS dédiée au haut niveau et à la haute performance ?
La transformation en Établissement Public Administratif (EPA), recentré exclusivement sur l’accès au haut niveau, le haut niveau et la haute performance, aurait une forme de logique. Elle permettrait
- d’assurer une articulation claire entre le niveau national (pilotage stratégique et ressources) et le niveau territorial (mise en œuvre par les préfets et les DRAJES) ;
- de donner à l’État un outil plus efficace et légitime pour piloter la politique sportive dans son volet performance.
Réinstaurer un dialogue fertile entre le national et les territoires
Si cette réforme venait à être engagée, elle marquerait une réconciliation entre le national et le territorial, après des années de bricolages institutionnels. Le préfet, les DRAJES et une ANS transformée en EPA formeraient un triptyque cohérent : l’État reprendrait le contrôle complet du sport de haut niveau, en alignant enfin gouvernance, financements et ressources humaines. Aux territoires et au mouvement sportif avec le monde économique de gérer le reste ….