Reposant finalement sur le volontariat des enseignants, l’évaluation des aptitudes physiques des élèves pourra être organisée à l’entrée au collège selon un protocole standardisé.
Le dispositif. Entre le 8 septembre et le 17 octobre, les enseignants d’EPS sont invités à faire passer 3 tests pour apprécier les qualités physiques des élèves, ne présentant aucune contre-indication médicale et aucun signe clinique anormal et inhabituel :
- endurance (test de Luc léger, à partir de 8,5 km/h, incrémenté à 0,5 km/h) ;
- force musculaire explosive (saut en longueur stabilisé, sans élan, 2 essais, mesure au cm) ;
- vitesse (course 30 m plat, départ debout, chronométrage lorsque le pied arrière quitte le sol, temps au 1/10e de s).
A lire
Le protocole retenu doit permettre le passage de toute une classe sur une séquence de 2h. Selon leurs résultats, les élèves sont classés en 3 groupes de maîtrise (à besoins, fragile, satisfaisant) ce qui doit permettre, selon la présentation ministérielle :
- une communication aux familles ;
- une meilleure prise en compte des aptitudes des élèves (besoins et potentiel individuel, profil de classe) par les enseignants (adaptation des contenus) ;
- un affinement des projets d’EPS et d’établissement pour construire un mode de vie actif.
3 interrogations parmi d’autres…
- Tests sanitaires ou scolaires ? Les évaluations en mathématiques et français sont pratiquées depuis longtemps à l’entrée en 6e. Elles visent à mesurer l’acquisitions des compétences à l’issue de la scolarité primaire et déterminer les besoins de soutien pour que les lacunes ne soient pas un obstacle à la poursuite de la scolarité. Pour les tests d’aptitude physique, même si les consignes données aux élèves utilisent le terme « d’évaluation », il s’agit d’apprécier des qualités qui semblent indépendantes du parcours scolaire antérieur auquel il n’est d’ailleurs jamais fait référence. Leur premier intérêt est sans doute de constituer une véritable mesure de l’état physique des jeunes d’aujourd’hui, de nombreux auteurs signalant le manque de données fiables nécessaires à toute comparaison sociale (selon le genre, le statut social des familles, l’origine géographique) ou temporelle (évolution entre les générations).
- L’impact de la catégorisation des résultats. On peut s’interroger sur les 3 groupes de maîtrise de chaque qualité physique, établis après une expérimentation auprès de 4100 élèves. Malgré une école qui se veut respectueuse et inclusive, 70/80% du groupe « satisfaisant » sera composé des garçons et les filles seront 50% plus nombreuses que les garçons dans le groupe « à besoins ». En outre, malgré les appellations choisies, ces 3 groupes ne disent rien du bon état de santé ou du potentiel d’évolution de chaque élève, au regard de sa situation corporelle (si les valeurs médianes poids/taille sont proches, environ 1% des élèves de 10-12 ans sont anorexiques, 4% obèses, 17% en surpoids) ou de leur capacité à comprendre et à réaliser effectivement des tests fiables (environ 10% d’élèves à besoins éducatifs particuliers).
- Lever un débat ancien chez les professeurs d’EPS. Comme l’indique D.Delignières, et les réactions qui ont suivi sa publication, les enseignants d’EPS peuvent se sentir « piégés » au milieu d’injonctions ou d’ambitions contradictoires, celles d’une discipline qui ignorerait les conséquences du « tsunami d’inactivité physique », qui se diviserait entre les visions hygiénistes, sanitaires, éducatives ou sportives qui jalonnent ses débats professionnels, ou qui craindrait le reproche d’une incapacité à régler des problèmes sociétaux (malbouffe, sédentarité), alors que l’on connait le manque de moyens horaires et matériels consacrés à l’EPS…
A lire
Après les tests. La triple ambition affichée de permettre à chaque élève de « visualiser les progrès accomplis, de comprendre ses marges de progression, de connaître les enjeux liés à la condition physique », et celle donnée aux enseignants « d’adapter les contenus et les démarches pédagogiques en conséquence » nécessitera un travail de longue haleine que la médiatisation trop rapide de résultats mal analysés pourrait contrarier.
P.-P. Bureau pour Décideurs du sport
Pour en savoir plus :
La note d’information DEPP 25-20 : résultats des expérimentations 2024 sur 4100 élèves
Sur le site ministériel Eduscol : l’évaluation des aptitudes physiques des élèves de 6e, rentrée 2025
Documents mis à disposition pour la passation
- Guide de passation
- Descriptif détaillé du contenu de l’évaluation
- Vidéos de présentation de l’évaluation :
- Mentions informatives relatives au traitement des données personnelles