Il est l’un des professeurs qui a le plus marqué ma vie d’étudiant. On l’appelait affectueusement Papy Junqua. Il est décédé à l’age de 83 ans. Un dernier hommage lui a été rendu hier au crématorium de Poitiers.
Précurseur dans tous les domaines
Dès la fin des années 70 il a été un des premiers à percevoir l’évolution des métiers du sport. Il créé la première maitrise qu’on dénomme aujourd’hui « management du sport ». C’est également à cette époque qu’il s’engage dans la recherche en créant un laboratoire CNRS consacré à l’étude de l’interaction entre la pratique et les matériaux / matériels sportifs. Il consacrera le reste de sa vie l’étude mécanique des gestes sportifs.
A la fin des années 80 avec Agathon Lepève (président du CROS Poitou-Charentes), il crée le Centre régional d’innovation et de transfert de technologie (CRITT) Sports-loisirs Longtemps présidé par André Leclerc, le CRITT aujourd’hui basé à Châtellerault, il est présidé par Patrick Lacouture et est dirigé par Franck Leplanquais
Il est également à l’origine des classes sciences et sports (lien vers video Youtube classes sciences et sports ) dont le but est de construire une approche scientifique de la pratique sportive. Grâce à des appareils de mesure adaptés, les élèves réalisent les gestes sportifs puis les analysent de différentes manières : calculs, schémas des forces exercées ou encore analyse de courbes. La science s’applique alors à leurs capacités physiques et performances : ils les étudient et peuvent ensuite chercher comment les améliorer, ou se comparer à des champions !
Alain Junqua aimait citer Etienne Klein, philosophe des sciences, « Pour donner le goût des sciences, il faut donner du goût aux sciences »
Nos derniers échanges datent d’il y a un an pratiquement jour pour jour. Echange au cours duquel il me présentait son dernier ouvrage.
D’une rigueur scientifique absolue
Je n’ai pas eu beaucoup de cours avec Alain Junqua, mais il m’a inculqué cette impérieuse nécessité de prendre du recul et d’analyser les choses, de les vérifier, d’avoir une démarche scientifique. Tous ceux qui l’ont côtoyé ont pu mesurer cette exigence. Dans le labo « le bocal » (au départ un espace de rangement de la halle universitaire de tennis), il a constitué une équipe hors norme avec Patrick Lacouture, Jacques Duboy, Francis Trilles, Marcel Mareau, … inlassablement sur la plateforme de force biomécanique ils répétaient les expérimentations, décortiquaient les images et notamment celles du saut de Beamon. Nous, on servait de cobaye tantôt pour tester les tapis de judo, tantôt pour tester l’usure des chaussure.
A Alain Junqua je lui dois mon stage de maitrise au CUFEP sous la direction de Hugues Cochard. C’est la rencontre avec Guy Jean Tabuteau au CNFPT qui me permettra d’intégrer ensuite le CNFPT. La suite c’est sur mon CV.
Construire les ponts entre l’école, le savoir et le sport
C’est le fil rouge de sa carrière. Les classes sciences et sports ne sont que l’aboutissement d’une longue réflexion débutée quelques décennies avant. En effet Alain Junqua a plaidé trés tot pour la création d’une filière sportive dans les collectivités territoriales. Aux cotés de Yves Touchard il a aussi contribué à la mise en place des formations de CPC et CPD et EPS dans les années 90, formations organisées alors chez le regretté Maurice Pujol à Vichy.
Je ne connaissais pas sa famille. Je lui présente toutes mes condoléance. Je voulais juste leur dire que j’ai eu la chance de croiser le professeur Alain Junqua.