Clubs professionnels de rugby en Occitanie : un modèle fragile entre capitaux privés, solidarité incertaine et financements publics sous contrôle
À l’occasion de ses contrôles, la chambre régionale des comptes Occitanie dresse un constat préoccupant : derrière la passion rugbystique et le poids historique de la région (un cinquième des licences françaises), le modèle économique des clubs professionnels repose sur des bases fragiles. Dépendance aux actionnaires privés, solidarité inégale avec le secteur amateur et soutien public parfois mal encadré composent un paysage contrasté, appelant une gouvernance plus rigoureuse et plus intégrée.
Les points clés à retenir
- Un modèle économique déficitaire : la plupart des clubs présentent un déficit d’exploitation structurel, aggravé par le poids de la masse salariale. Leur équilibre dépend fortement des apports en capital d’actionnaires privés (ex. Altrad à Montpellier, Pierre Fabre à Castres).
- Des recettes insuffisamment diversifiées : billetterie et partenariats dominent, mais restent trop dépendants des résultats sportifs. Le Stade Toulousain fait figure d’exception grâce à la diversification de ses revenus et à la propriété de son stade.
- Solidarité professionnelle–amateur inégale : le principe de soutien financier du secteur pro à l’association est appliqué de manière très variable, parfois même inversée, certaines associations venant en aide aux clubs pros. L’usage de la marque n’est pas toujours rémunéré.
- Un financement public significatif mais mal encadré : subventions, achats de prestations, mises à disposition de stades représentent entre 1 et 3 M€ par club et par saison, mais les conditions d’attribution et de contrôle sont parfois insuffisantes (missions d’intérêt général mal définies, redevances trop faibles).
- Un besoin de gouvernance intégrée : la CRC recommande de renforcer le dialogue entre associations et sociétés professionnelles pour bâtir des stratégies communes et mieux équilibrer les intérêts.
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Il y a 30 ans, le rugby passait le cap du professionnalisme. La chambre régionale des comptes d’Occitanie s’est penchée sur la situation financière des 7 clubs pros d’Occitanie. Le système imaginé alors par le législateur n’est pas viable, exception faite du Stade Toulousain. Voilà pourquoi.
L’exception toulousaine
Le Stade Toulousain se distingue nettement des autres clubs de l’échantillon contrôlé par la CRC Occitanie. Propriétaire de son stade Ernest-Wallon, le club bénéficie d’un modèle plus diversifié et plus équilibré :
- Recettes en forte croissance : +70 % de billetterie entre 2018 et 2022, au point de devenir le deuxième poste de revenus derrière les partenariats.
- Diversification réussie : près de 27 % du chiffre d’affaires provient d’activités hors jour de match (produits dérivés, restauration, location d’espaces), contre 13 % en moyenne dans le Top 14.
- Résultats sportifs porteurs : la dynamique victorieuse depuis 2018 alimente l’attractivité du club, son taux de remplissage avoisine les 100 %, et la moyenne d’abonnés le place dans le top 3 du championnat.
- Solidité financière : seul club excédentaire en 2022-23 (+2,4 M€), couvrant 96 % de ses charges d’exploitation par ses recettes propres.
- Ancrage associatif fort : contrairement à la tendance générale, les associations liées au Stade Toulousain détiennent encore 67 % du capital social, garantissant une gouvernance plus équilibrée.
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