Publication du rapport Dirx – « Le sport : une ambition à structurer, un héritage à construire »
Commandé dans un contexte de forte tension sur les finances publiques, le rapport Dirx ambitionne de faire du sport une priorité nationale. Mais à l’heure où l’on exige des économies, il propose… deux nouvelles structures de gouvernance : la création d’un Comité interministériel du sport et une Conférence nationale du sport. Il propose le recentrage de l’ANS sur le haut niveau.
Remis le 30 juillet 2025 par le député Benjamin Dirx à la ministre des Sports et au ministre chargé des Comptes publics, le rapport « Le sport : une ambition à structurer, un héritage à construire » s’inscrit dans un cadre budgétaire clair, fixé par le Premier ministre : formuler des propositions concrètes, réalistes, et accompagnées d’une estimation de leurs coûts et de leur impact pour les contribuables.
Malgré un travail de fond remarquable – plus de 80 auditions et 300 acteurs rencontrés – le rapport n’est que partiellement conforme à cette exigence. Il met en avant une ambition politique forte, un diagnostic lucide, 40 recommandations, qui sont majoritairement formulées sans évaluation financière précise. Les enjeux de soutenabilité et de hiérarchisation budgétaire restent en suspens.
Un constat sans appel
Le rapport met en exergue la complexité du modèle notamment sur les financements
- Un manque de lisibilité de la cartographie globale des financements
- De nombreux doublons qui peuvent aboutir à saupoudrer plutôt que d’inciter
- Une grande complexité administrative
- Un manque de contrôle du bon usage des deniers publics et de la cohérence de l’ensemble
- Une réelle carence d’infrastructures dans certains territoires
- Un manque de prévisibilité pour les acteurs
- Une difficulté à faire contribuer le secteur privé
6 orientations
Le rapport appelle à une refonte complète de la politique sportive nationale autour des orientations suivantes
- Assurer une visibilité budgétaire, en proposant une résolution ou une loi de programmation qui sanctuarise le budget du sport et rebudgétiser les taxes actuellement affectées, dans le cadre d’un plan pluriannuel de financement stable et lisible.
- Création d’un Comité interministériel du sport placé sous l’autorité du Premier ministre.
- Un recentrage de l’Agence nationale du sport sur le haut niveau, avec un sport pour tous mieux piloté par l’État territorial.
- Un rôle accru des préfets et des diagnostics territoriaux partagés pour ancrer la politique sportive dans les réalités locales.
- Une simplification radicale de l’accès aux aides publiques pour les clubs, avec un guichet unique.
- Modification des assiettes de la taxe Buffet et de la taxe sur les paris sportifs
Les 40 recommandations du rapport Dirx
Refonder la gouvernance publique du sport : un impératif interministériel
– Recommandation 1 Travailler à une plus grande exhaustivité de recensements des financements publics en faveur du sport transcrit dans le jaune budgétaire.
– Recommandation 2 Créer un Comité interministériel du sport placé sous l’autorité du Premier ministre et coordonné par le ministre des Sports.
Le ministère des Sports : garant du cadre régalien, stratège des politiques publiques, évaluateur de l’action sportive
– Recommandation 3 Mener une revue ciblée des normes et obligations inscrites au Code du sport, dans une logique inspirée des démarches de simplification administrative, afinde préserver les exigences de sécurité tout en s’assurant qu’elles ne freinent ni l’accessibilité des pratiques sportives ni leur développement, notamment à l’échelle locale.
– Recommandation 4 Mener une expertise juridique approfondie sur le régime de la délégation et des contrats associés afin d’assurer une cohérence renforcée entre les exigences réglementaires, les missions réellement confiées aux fédérations, et l’objectif de performance du modèle sportif national.
– Recommandation 5 Renforcer les contrôles de respect des principes fixés dans les contrats d’engagements républicains pour les associations sportives qui bénéficient de subventionnement.
– Recommandation 6 Renforcer le ministère des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative dans son rôle de stratège et de pilote de la politique publique du sport, notamment à travers un appui renforcé à l’évaluation des dispositifs, à la définition d’orientations interministérielles et au soutien des démarches basées sur des diagnostics territoriaux partagés.
– Recommandation 7 Examiner la possibilité d’intégrer la question du sport à l’école dans les thématiques qui seront examinées lors de la convention citoyenne sur les temps de l’enfant.
– Recommandation 8 Créer un laboratoire d’innovation des politiques sportives au sein de la direction des sports, doté d’une cellule partenariale d’appui, et renforcer le pilotage des pôles ressources nationaux ainsi que l’accompagnement des transitions économiques des acteurs du sport.
– Recommandation 9 Poursuivre l’effort de rééquilibrage des moyens humains de l’État entre fédérations et entre territoires, tout en développant les mutualisations pour mieux
épondre aux besoins identifiés et renforcer la présence territoriale des CTS.
L’ANS : de l’opérateur de moyens au levier stratégique de la politique sportiv
– Recommandation 10 Engager une évaluation des contributions financières et opérationnelles des membres fondateurs de l’ANS afin de garantir une gouvernance équilibrée, cohérente avec les apports effectifs de chacun. Cette recommandation s’applique uniquement dans le cas où la forme de gouvernance devait être maintenue.
– Recommandation 11 Recentrer les conférences régionales du sport sur la définition de priorités territoriales issues de diagnostics partagés et sur l’animation des projets structurants, dans une logique de concertation et de contractualisation avec les collectivités territoriales, en lien avec la conférence nationale du sport.
– Recommandation 12 Simplifier le dispositif en offrant la possibilité de supprimer la conférence régionale des financeurs.
– Recommandation 13 Veiller à ce que l’engagement de l’État soit systématiquement rendu visible dans
toutes les actions et supports des opérateurs du sport, qu’il s’agisse du développement des pratiques sportives ou de l’accompagnement du haut niveau, afin d’affirmer son rôle moteur dans la politique publique du sport.
– Recommandation 14 Consolider et accompagner le portage des PSF par le mouvement sportif, pour
optimiser le portage des politiques publiques.
– Recommandation 15 Réorienter une part significative des crédits du Projet Sportif Fédéral (PSF) vers
les actions concrètes menées au plus près des territoires, avec une attention particulière au soutien direct des clubs. Cet effort doit s’appuyer sur un meilleur équilibre entre les projets structurants portés par les fédérations et les initiatives locales.
– Recommandation 16 Développer une stratégie nationale de diagnostic territorial et sociologique pour
mieux cibler les publics éloignés de la pratique sportive — notamment les non licenciés, les personnes précaires, les personnes en situation de handicap ou les publics sédentaires — et orienter prioritairement les moyens publics vers ces publics, au-delà du seul soutien aux structures traditionnelles. La plateforme Data ES est une base qui doit participer à la construction du diagnostic.
– Recommandation 17 Renforcer la capacité de l’État à évaluer l’impact des politiques sportives en
s’appuyant sur le mouvement sportif, les intercommunalités et des dispositifs consolidés de collecte de données, afin d’objectiver les résultats des projets soutenus et d’ajuster les priorités de l’action publique en matière de sport.
Recommandation 18 Renforcer la capacité d’accompagnement territorial de l’État en positionnant,
dans chaque département, un Conseiller Technique Territorial, chargé du diagnostic des besoins, du soutien à l’ingénierie des PST et de la coordination des politiques locales du sport, en appui des porteurs de projets.
– Recommandation 19 Recentrer la compétence opérationnelle de l’État sur la politique du sport pour
tous, en la confiant aux services déconcentrés de l’État (DRAJES, sous l’autorité des préfets), tout en redéfinissant le rôle de l’Agence nationale du sport autour du haut et très haut niveau.
– Recommandation 20 Installer une Conférence nationale du sport, présidée par le ministre des Sports,
réunissant les représentants de l’État, des collectivités territoriales, du mouvement sportif, des acteurs économiques, ainsi que des experts.
Doter la France d’un parc d’équipements sportifs à la hauteur de ses ambitions
– Recommandation 21 Élaborer, à l’échelle de chaque département, un diagnostic des besoins en
équipements sportifs fondé sur les données objectives de la base Data ES, intégrant notamment les priorités de rénovation, y compris sur le plan énergétique.
– Recommandation 22 Mettre en place, sous l’autorité des préfets et en coordination avec les services
académiques et les collectivités, un diagnostic territorial obligatoire de l’usage des équipements sportifs scolaires, identifiant et motivant les freins à leurouverture hors temps scolaire. Ce travail devra identifier les aménagements nécessaires pour favoriser leur accessibilité encadrée.
– Recommandation 23 Permettre la réalisation d’équipements sportifs jugés prioritaires à l’issue d’un
diagnostic territorial, en aménageant leur régime d’artificialisation des sols, soit par une exclusion ciblée du dispositif ZAN, soit par l’application d’un taux d’impact réduit.
– Recommandation 24 Renforcer la cohérence et la lisibilité de l’accompagnement financier aux
équipements sportifs en adossant leur financement aux dispositifs de droit commun placés sous l’autorité des préfets, sur la base de critères partagés et de diagnostics territoriaux.
– Recommandation 25 Créer des ratios nationaux d’équipements par habitant (prenant en compte les
temps de déplacements) permettant de définir les différents niveaux de priorités territoriales d’investissement. Le positionnement d’un territoire pourra justifier d’une obligation de financement d’un équipement sportif répondant à la carence.
– Recommandation 26 Permettre le financement des piscines et autres équipements sportifs aux moyens des enveloppes budgétaires dédiées y compris le fonds vert.
– Recommandation 27 Permettre aux collectivités de récupérer la TVA sur toutes les opérations de
rénovation et/ou d’entretien des équipements sportifs. L’impact budgétaire de cette mesure nécessite d’être évalué. Il méritera d’être considéré en comparaison des budgets qui seraient nécessaires à des constructions nouvelles se substituant aux logiques d’entretien et de rénovations.
Le sport enjeux de santé : Les maisons sport santé
Recommandation 28 S’appuyer sur les maisons sport santé pour initier un dispositif spécifique
d’accompagnement des patients en affection de longue durée, afin de prévenir, – par la pratique d’une activité physique, les risques d’apparition d’affections
secondaires.
Programmer l’ambition : une vision stabilisée des financements au service du sport et des territoires
– Recommandation 29 Elargir le champ de la taxe sur la publicité aux dépenses de sponsoring des
acteurs des paris sportifs.
– Recommandation 30 Encourager toutes les mesures, y compris législatives, visant à lutter contre le
piratage et le streaming illégal.
– Recommandation 31 Intégrer toutes les formes de diffusion dont le streaming dans l’assiette de la taxe
Buffet pour tous les événements sportifs déjà assujettis à cette fiscalité.
– Recommandation 32 Autoriser la publicité virtuelle durant les matches sous réserve de règles
déontologiques strictes fixées par l’Etat.
– Recommandation 33 Etablir un plan pluriannuel du financement du sport traduite dans une loi de
programmation prévoyant une sanctuarisation du budget et une rebudgétisation
des taxes affectées. A minima cette orientation devra se traduire au travers d’une
proposition de résolution.
– Recommandation 34 Rédiger un guide du mécénat sportif afin de mieux accompagner les entreprises
et les clubs sportifs dans la recherche de financements privés
– Recommandation 35 Confier à la filière sport, qui réunit les parties prenantes du sport, et notamment
les syndicats patronaux et salariés, la mission de mieux faire connaitre le mécénat de compétences. Mieux valoriser également les initiatives en matière de fondation, notamment la fondation pour le sport qui permet de financer directement des clubs ou des sportifs de haut niveau.
– Recommandation 36 Autoriser explicitement une souplesse en matière de contreparties au mécénat
d’entreprise.
– Recommandation 37 Pérenniser l’exemption de l’assiette des cotisations sociales des hospitalités qui
avait été accordée exceptionnellement en 2023 et 2024.
– Recommandation 38 Conforter le CNOSF dans sa mission de réflexion et d’accompagnement dans la
refonte du modèle économique du sport.
– Recommandation 39 Engager une réflexion et une communication sur la construction et l’exploitation
d’infrastructures sportives afin de mieux concilier gestion publique et privée
– Recommandation 40 Généraliser la logique du guichet unique dans les aides publiques à destination
des clubs sportifs. Elle pourrait se faire via le Compte Asso.