L’annonce prochaine de la création de la nouvelle agence du sport semble satisfaire les acteurs du sport. Le lobbying récent de certaines organisations professionnelle a en plus permis d’inviter à la table des fondateurs en plus du Medef, la CPME, l’U2P, L’union Sport et Cycles et le COSMOS. Il n’y a que le Conseil d’Etat pour s’émouvoir de cette création d’une agence sous la forme d’un GIP. Selon la doctrine un établissement national financé par de l’argent public devrait prendre la forme d’un EPA.
Mais on est proche du but. La création de l’agence est annoncée en avril. La révolution préparée depuis un an et demi va-t-elle avoir lieu ?
Pas si cette nouvelle gouvernance se limite à la création de l’agence. L’enjeu de la nouvelle gouvernance n’est pas la création de l’agence mais la mise en œuvre de projets partagés sur les territoires. Or tout se passe comme si le but était déjà atteint. Certains acteurs sont d’ailleurs las d’avoir obtenu la création de l’agence, tant la démarche pour y parvenir a été complexe.
La création de l’agence n’est pas une finalité juste un moyen
Comme me l’ont rapporté plusieurs personnes ces dernières semaines « si on résume, ça ne change rien la création de l’agence ! sauf qu’il n’y a plus de CNDS ». Le CNDS sur les territoires est perçu comme un fond et pas comme une structure. Un fond marqué par son histoire (le FNDS) et par sa dimension concrète des lignes de crédits versées par l’Etat.
La création de l’agence vise
– d’une part à soutenir et structurer le haut niveau et la haute performance. l’Etat conserve la main avec 60 % des voies pour toute décision relative à cette politique
– d’autre part un budget affecté au développement des pratiques qui vise selon l’article 3-1 des projets de statut de l’agence à « accompagner des projets de développement des fédérations et de leurs déclinaisons territoriales, à corriger des inégalités sociales et territoriales en matière d’accès aux pratiques et aux équipements sportifs, ainsi qu’à soutenir les équipements structurants au regard de la politique sportive nationale ».
Là c’est beaucoup plus flou puisque selon les statuts (art 13-2) le conseil d’administration « adopte des critères d’intervention financière du groupement en matière de développement des pratiques sportives » et le directeur de l’agence (art 16-2) attribue « des concours financiers pris en application des règlements d’intervention délibérés par le conseil d’administration notamment en direction des collectivités territoriales et leurs groupements et autres associations ».
En passant, à aucun moment dans les statuts le conseil d’administration adopte un règlement d’intervention ! Mettons ça sur le compte d’une erreur de rédaction.
En l’état de la rédaction de la convention constitutive de l’agence, le conseil d’administration va discuter des orientations, des priorités politiques mais au final tel que c’est rédigé c’est le directeur de l’agence qui décidera de financer tels ou tels territoires, tels ou tels acteurs. Un peu comme si les députés votaient des orientations politiques sur la loi de finance et le gouvernement définissait des budgets pour chaque ministère et politique sans vote ! Cela ne serait pas un progrès en termes de gouvernance partagé et même un recul par rapport au fonctionnement actuel du CNDS où le CA vote les subventions par territoire et par équipement.
Quel niveau pour les conférences des financeurs ?
Si les conférences du sport seront bien de niveau régional comme l’a rappelé le préfigurateur de l’agence devant les députés récemment, http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7455070_5c9b3285d0442.commission-des-affaires-culturelles–m-frederic-sanaur-prefigurateur-de-l-agence-du-sport-27-mars-2019 il y a encore un débat sur le niveau des conférences des financeurs.
Les conférences du sport sont des lieux de débats des politiques sportives entre tous les acteurs. Comment imaginer que l’exécutif de ces parlements, les financeurs ne soient pas au même niveau, réunis dans une conférence régionale des financeurs.
Une hypothèse consisterait à mettre en place des conférences des financeurs au niveau départemental voire métropolitain. Dans ce cas disons clairement les choses. Si les crédits de l’agence sont délégués au niveau départemental c’est à dire au niveau des préfets ce sera un retour en arrière de plusieurs décennies et chaque préfet pourra certes sur les bases d’orientations partagées au niveau national gérer l’enveloppe à sa guise sur le modèle de la DETR.
Nous considérons que la gouvernance sur le territoire doit s’organiser au niveau régional sur le modèle de la gouvernance partagée au niveau national.
En refusant le principe de chef de file et plus encore la répartition de compétences entre les différents niveaux de collectivités les associations de collectivités ont de fait imposé cet exercice de co construction et de co financement.
Rien ne dit d’ailleurs que l’acte III de la décentralisation qui pourrait être annoncé suite au grand débat, voire les parlementaires au cours de la loi sport, ne souhaitent pas aller plus loi sur la répartition de compétences, ce qui aurait pour mérite de clarifier les choses et donc les financements !
L’inspection générale comme préfigurateur de la gouvernance sur les territoires
Qu’on se rassure, des expérimentations sont à venir sous le pilotage de l’inspection générale du ministère des sports, des inspecteurs qui récemment refusaient le désengagement de l’Etat dans le sport et qui « s’inquiétaient de la mise en place de la nouvelle gouvernance conjuguée à la réforme de l’organisation territoriale de l’État. » https://abonnes.lequipe.fr/Tous-sports/Actualites/Les-inspecteurs-generaux-inquiets/998983.
L’aventure démarre avec la création de l’agence
La création de l’agence c’est la promesse d’un monde meilleur, d’un voyage vers l’avenir pour 2 catégories de public : les sportifs de haut niveau et les pratiquants. Pour les sportifs de haut niveau qu’ils se rassurent des moyens sont préservés et le pilote est connu. Mais pour les autres on ne sait pas combien de temps durera le voyage, on ne sait pas par où il passera, si il s’effectuera en avion, en vélo, ou a pied, voire à la nage. Mais nous faisons confiance à la grande capacité d’adaptation des acteurs du sport qui sauront trouver les ressources pour relever les défis !