#presidentielle2022 Pierre Rabadan  » Anne Hidalgo souhaite mettre l’activité physique et sportive tout au long de la vie des Français »

Pierre Rabadan est en charge de la rédaction du programme sport de Anne Hidalgo. Il répond à nos questions : bilan du quinquennat, premières propositions de A Hidalgo, programme détaillé, héritage de Paris 2024, gouvernance du sport

Pierre Rabadan Vous êtes en charge de la rédaction du programme sport au sein de l’équipe d’Anne Hidalgo. Quel regard portez-vous sur le quinquennat d’E Macron ? Selon vous le président a-t-il tenu ses engagements ?

C’est un quinquennat décevant pour le sport, que je résumerais en 3 constats factuels 

D’abord malgré un programme peu ambitieux pour le sport, Emmanuel Macron et son gouvernement n’ont atteint que la moitié de ses promesses de campagne de 2017

Ensuite l’affaiblissement des associations sportives dû à la baisse drastique des emplois aidés dès l’été 2017, la baisse du financement des collectivités locales qui financent le sport Français à plus de 60% selon le dernier étude BPCE, accentuée dangereusement par les coûts de la crise sanitaire COVID la crise sanitaire et ses conséquences sur la sédentarité et la perte de licenciés pour certains secteurs, auquel s’ajoute une crise de renouvellement du bénévolat et de son engagement.

Et enfin l’absence d’une grande loi structurante sur le sport visant à mettre la pratique d’activités physiques et sportives au cœur du quotidien des Françaises et des Français et à répondre à de nombreux enjeux de notre époque, de la santé publique à l’éducation en passant par l’apprentissage du respect des règles et des autres…

Je regrette également la suppression d’un ministère des sports de plein exercice en cours de mandat, à quatre ans des Jeux.

Quelles sont les premières mesures que prendra Anne Hidalgo dans le domaine du sport si elle est élue président de la république ?

Je tiens d’abord à saluer de la participation d’Anne Hidalgo au Grand Oral Sport organisé le 17 mars dernier par huit grands acteurs du monde du sport. Ce format était intéressant pour évoquer les enjeux majeurs du sport à France à l’avenir. J’espérais une représentation de l’ensemble des candidats pour le seul temps fort concernant le sport durant la campagne et seul 3 candidats ont fait le déplacement ( M. Roussel et M.Jadot) tous de gauche. Cela souligne sans doute l’importance  que l’on donne à la pratique sportive et à son développement dans la vie de français!

Durant ce Grand Oral, elle a pu développer ses propositions. Présidente de la République, ses quatre premières mesures seront  :

  1. Lancement d’un plan d’investissement dans les équipements sportifs structurants de 5 milliards d’euros sur le quinquennat 
  2. Rétablissement d’un ministère des sports de plein exercice, garant d’un développement de la pratique sportive et para-sportive dans tous les territoires et promoteur du modèle sportif européen ;
  3. Renforcement des moyens de ce ministère, avec une augmentation de 50 % de ses crédits budgétaires. La première loi de finances sera aussi l’occasion de déplafonner les trois taxes affectées à l’Agence nationale du sport ;
  4. Augmentation du nombre d’heures d’EPS dans le premier et le second degrés : cela nécessitera de former et recruter davantage de professeurs d’EPS.

D’une manière générale quelles sont les grandes orientations qu’Anne Hidalgo souhaite mettre en œuvre durant ce quinquennat.

Trois axes principaux structureront son action dans le domaine du sport :

  • Mettre l’activité physique et sportive dans le quotidien des Français et tout au long de la vie,
  • Valoriser les bénévoles et redonner de l’attractivité à cet engagement fondamental pour la vie des clubs,
  • Permettre la montée en compétence du secteur sportif pour s’adapter aux évolutions et demandes actuelles

Mettre l’activité physique et sportive au cœur du quotidien des Français et tout au long de la vie est véritablement le premier engagement sur lequel nous devons bâtir notre politique sportive et de santé.

L’activité physique doit être considérée comme un « fondamental », un socle commun à tous les individus et ceci pour trois raisons principales :

  • C’est un enjeu essentiel de santé publique qui permet de lutter contre le fléau de la sédentarité,
  • Le sport est un outil de lutte contre le décrochage scolaire et pour l’inclusion. Je cite par exemple ce qui est mis en place dans le cadre de l’héritage des JOP de Paris 2024 en ce moment dans le 13ème à Paris.
  • La pratique sportive doit devenir une habitude de vie, et cela sera facilité si elle est prise tout au long du parcours éducatif, dès le plus jeune âge, au sein de l’éducation nationale puis de l’enseignement supérieur.

C’est pour cette raison que nous créerons le PEPS, Parcours d’Éducation Physiques et Sportives, de 3 ans à 20 ans afin de développer un habitus sportif chez tous les élèves.

Nous mettrons également en place un bilan de santé et d’activités annuels pour encadrer l’évolution de la sédentarité chez tous les élèves. Des projets concrets et réalistes pour permettre de réaliser ces tests en 15 min, avec peu d’encadrement, sont en cours.

Nous renforcerons de manière significative (+50% à minima) le nombre d’heure d’EPS hebdomadaire en dédiant 2 matinées par semaine pour des Activités Physiques et Sportives avec des activités nouvelles. En parallèle nous procèderons à une augmentation significative des moyens dédiés à la formation des professeurs (STAPS) et éducateurs sportifs.

Le développement des CHASE (Classes à horaires aménagées Sport d’excellence) en 2ème cycle puis de double parcours valorisants en 3ème cycle, sur l’ensemble du territoire et dans tous les domaines de l’enseignement  supérieur sera également mis en place.

Enfin nous favoriserons la mise en place à minima d’une association sportive par établissement avec l’USEP, l’UNSS, le CNOSF… en lien conventionné avec les clubs locaux, pour assurer la continuité et le suivi de la pratique.

Le second pilier de la politique sportive par Anne Hidalgo repose sur la valorisation des bénévoles et l’urgence de redonner de l’attractivité à cet engagement fondamental pour la vie des clubs

Parce que notre mouvement sportif tient aujourd’hui encore sur le système associatif, le sujet du bénévolat est également à reconsidérer et à valoriser:

NNous avons la forte volonté de valoriser et dynamiser le bénévolat (3,5 millions de personnes) qui maintient notre système associatif. Cela passera par la création d’un statut de bénévole qui permette de reconnaitre et de valoriser l’engagement et de garantir l’encadrement des responsabilités confiées aux bénévoles. La valorisation du bénévolat correspond à 10,1Mds€ annuel.

Nous portons également dans notre programme la nécessité de renforcer la protection du bénévole en matière de responsabilité personnelle et de renforcer le « bénévolat de compétences » afin de tisser des liens entre les entreprises et les associations. 

La troisième orientation que je souhaite citer, c’est permettre la montée en compétence du secteur sportif pour s’adapter aux exigences et évolutions actuelles

Il faut avoir conscience du savoir-faire des grands événements en France que nous avons développé volontairement entre 2015 et 2020. Une expertise est légitimement reconnue à la France en ce domaine. C’est l’une de raisons qui nous a permis d’obtenir l’organisation des JOP de Paris 2024. Mais d’autres événements sportifs internationaux arrivent très prochainement (la coupe du monde de rugby notamment)

Ce sont des opportunités pour développer et créer de l’emploi dans de nombreux secteurs. Et nous avons voulu que ces emplois soient pérennisés au-delà de ces échéances en renforçant la qualification et formation événementiel.

Concrètement il s’agit de quoi ?

Plus de 150 000 emplois seront mobilisés pour la bonne organisation de Paris 2024.

Le sujet de la professionnalisation de la filière et du développement de ces secteurs d’emploi (hors accueil de grands évènements) est majeur

Par exemple rendre possible l’accès au sport à toutes les Françaises et tous les Français va considérablement augmenter notre besoin en nouveaux emplois, en animateurs, en éducateurs spécialisés pour différents publics.

C’est vers les formations de l’enseignement supérieur de la filière STAPS que nos regards et nos efforts doivent se tourner. Cette filière est pourvoyeuse d’un grand nombre des emplois de demain, notamment dans le cadre du chantier de l’autonomie. Aussi nous prévoyons :

  • un renforcement significatif des moyens humains et financiers de la filière  STAPS (+ 100 postes dès la rentrée 2022) et développement des spécialités  “Handisport, sport adapté, sport inclusif”
  • Une augmentation du  nombre de professeurs d’EPS, car c’est dans les premières années que les habitudes se prennent
  • Le développement de l’alternance et l’apprentissage au sein de la filière sport ,qui regroupe plus de 113 000 entreprises, avec maintenant des aides à l’embauche des apprentis et des salariés en contrat de professionnalisation.
  • La mise en place d’un guichet unique « métiers du sport » sur nos territoires
  • Le soutien et l’encadrement du développement du ESPORT et des activités proposées par l’ensemble du secteur privé (les français doivent faire du sport !)

Durant ce quinquennat auront lieu les JOP en 2024. Au-delà des résultats et du nombre de médailles l’héritage constitue un enjeu essentiel souvent mis en avant mais aujourd’hui qui peine à se construire. Quelles dispositions comptez-vous prendre ?

Si la France veut briller dans les compétitions internationales, il ne s’agit pas seulement d’exiger des médailles de nos sportifs et sportives de haut niveau !

Il faut leur donner les moyens de réussir, créer les conditions permettant d’accompagner nos futurs championnes et champions vers les sommets. Cette ascension est parfois rapide mais peu aussi s’avérer très complexe selon son développement physique, la structuration de son sport et sa capacité de performer sur la durée. Il est primordial de construire les  doubles parcours car beaucoup de sports ne permettent pas à ce jour de vivre de sa pratique et de ses performances… (Sans oublier les blessures, les obstacles de parcours, la concurrence).

Les doubles parcours développent les compétences physiques et intellectuelles, ils apprennent la rigueur, la détermination, la persévérance, la tempérance, compétences éminemment transposables à la vie du quotidien

Voici les pistes que nous souhaitons développer pour que ces JOP soient porteurs d’un véritable impact sur la structuration de la performance sportive dans notre pays :

  • Démultiplier les dispositifs CHASE dans les écoles/collèges (Classe à horaire aménagée sportive d’excellence) dans chaque région de France à l’image de ce qui a été mise en place à Paris.
  • Imposer  des doubles parcours adaptés à chaque formation dans toutes les structures de l’enseignement supérieur 
  • Pour sécuriser les sportifs de Haut Niveau créer un statut sur le modèle  « intermittents ».  Cela consistera à la mise en place d’un revenu minimum garanti  pour les sportives et sportifs de haut niveau qui ne sont pas rattachés à une structure professionnelle. Mesure visant à garantir  1500€  de revenus par athlète  afin qu’ils/elles puissent  organiser leur quotidien de manière optimale pour performer sur la durée et lutter contre la précarité actuelle d’un grand nombre de SHN. Coût de la mesure estimé à 7,5M€ pour 5000 athlètes Élite.
  •  Généraliser les acquis conclus dans la convention collective du handball professionnel féminin à tout le sport professionnel féminin, pour sécuriser l’accompagnement de la carrière, des blessures, des grossesses, mais aussi de  l’après carrière de nos sportives Françaises qui font notre fierté partout dans le monde
  • Étendre cette convention collective à tous les sports professionnels pratiqués par des femmes,  avec leurs spécificités, en lien avec les ligues et fédérations, employés et salariés.

Mais les médailles ne font pas tout et l’héritage social et sociétal est central.

Rien que sur le concept même de ces Jeux de Paris 2024, pour lesquels nous avons souhaité porter avec Anne Hidalgo une nouvelle « manière de faire » : clairement, ils seront porteurs d’une nouvelle norme de jeux olympiques et paralympiques, compte-tenu de l’exigeante ambition environnementale de l’événement, de son impact économique, de la transformation territoriale qui marquera l’accueil de cette Olympiade pour de longues années notamment pour une partie de la Seine St Denis… Il s’agit ici de créer une rupture, de proposer un nouveau modèle pour l’accueil des grands événements planétaires, en lien avec les attentions et adaptations indispensables de notre époque.

Le développement de l’accessibilité universelle dans les normes de construction en sera aussi un héritage.

La reconquête de la Seine et sa réappropriation par les habitants est aussi un objectif majeur de l’héritage des Jeux de Paris 2024. Ce seront également les premiers Jeux totalement paritaires, ce qui doit guider nos ambitions vers une égalité totale à l’avenir, en toutes circonstances.

Enfin, et cette liste n’est pas exhaustive, nous souhaitons à Paris accélérer la sortie du Plastique à Usage unique (PUU) et la rendre effective dès 2024. En espérant que l’ensemble du territoire français suivra cette volonté dans les meilleurs délais, par effet d’entrainement.

Les JOP sont un accélérateur fort pour nos politiques publiques, un démonstrateur unique qui nous oblige à réussir, dans un contexte complexe.

La nouvelle gouvernance a été mise en place en 2019. Toutefois l’agence nationale du sport qui symbolise cette nouvelle gouvernance est critiquée. Certains candidats souhaitent la supprimer. Qu’avez-vous conseillé à Anne Hidalgo ?

L’Agence nationale du sport est récente et ne doit pas être accablée de tous les maux. Aussi, avec Anne Hidalgo, nous ne souhaitons pas la supprimer.

Toutefois, certaines de ses missions doivent être récupérées par le ministère des sports de plein exercice aux moyens renforcés que nous voulons. Je pense à ses actions en matière de développement des pratiques et ses instances territorialisées qui réunissent de nombreux acteurs du sport.

L’ANS aurait ainsi vocation à se concentrer sur la pratique du haut niveau, son parcours pour y accéder, la Haute Performance et son maintien sur la durée.

A deux ans des Jeux, il reste beaucoup à faire. Son nom pourrait d’ailleurs évoluer pour tenir compte du recentrage de ses missions.

Les collectivités ont également toute leur place dans la gouvernance du sport. Rappelons qu’une étude récente estime qu’elles contribuent pour 60 % au financement du sport dans notre pays. Dans le cadre de notre grand plan d’investissement dans les équipements sportifs structurants de 5 milliards d’euros, elles ont vocation à flécher les projets structurants  prioritaires. Toujours au sujet des collectivités territoriales, je suis favorable à ce que la loi prévoit clairement que la dotation de soutien à l’investissement local puisse servir à financer la rénovation nécessaire d’équipements sportifs existants et la construction de ceux qui sont nécessaires à une meilleurs pratique dans son parcours de vie .

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